Le Colonel Gamal Abdel Nasser se dirige vers le Doyen de la Littérature Arabe, Taha Hussein, et se présente lors de leur première rencontre après la Révolution du 23 Juillet

Le Colonel Gamal Abdel Nasser se dirige vers le Doyen de la Littérature Arabe, Taha Hussein, et se présente lors de leur première rencontre après la Révolution du 23 Juillet

Cet article a été traduit par Nadine Michel Nakhla

 Révisé par Aya Mohamad Abdel Fattah 

Écrit par : M. Saïd El Shahat

Le colonel Gamal Abdel Nasser s’est dirigé vers l’endroit où se tenait le doyen de la littérature arabe, Dr. Taha Hussein. Gamal a tendu la main, qu’il a serrée en se présentant : « Je suis Gamal Abdel Nasser. » Le grand écrivain a fermement serré la main du jeune révolutionnaire en lui disant : « Je voulais entendre ta voix depuis longtemps. Ce que vous avez réalisé est une opportunité unique pour l’histoire de l’Égypte. Cependant, une chose me gêne : le déclenchement de la révolution a coïncidé avec la crise financière. La révolution est une avancée, tandis que la crise financière est une contrainte, mais je suis certain que la révolution atteindra ses objectifs malgré tous les obstacles. » Le Dr. Taha Hussein s’est tu un moment puis a de nouveau serré la main de Gamal Abdel Nasser en lui disant : « Tu ne peux imaginer combien je voulais te voir et entendre ta voix, tu ne peux jamais imaginer. » Ainsi le rapporte la revue « Akher Saa » dans son numéro du 15 avril 1953.

La revue « Akher Saa » précise que cette rencontre était la première entre Gamal Abdel Nasser et Taha Hussein, et elle a eu lieu lors d’une grande fête publique qui s’est tenue pendant la deuxième semaine d’avril 1953, soit quelques mois après la révolution du 23 juillet 1952. Cette révolution s’est produite pendant les vacances estivales de Taha Hussein en Italie, comme l’affirme son beau-fils, Dr. Mohammed Hassan El-Zayyat, ministre des Affaires étrangères égyptien lors de la guerre d’octobre 1973 dans son livre « Au-delà des jours ».

El-Zayyat révèle que Taha Hussein était dans un hôtel situé à Colle Isarco, au nord de l’Italie, à la frontière avec l’Autriche. Le directeur de l’hôtel est entré en se précipitant en disant : « Un appel téléphonique de Rome, de l’ambassade égyptienne pour votre Excellence M. », il lui a tendu le téléphone pour qu’il puisse parler : « Allô, je suis Taha Hussein, bonjour M. l’ambassadeur. Quelle révolution ? En Égypte ? Vous avez entendu la Radio du Caire vous-même… Et le roi ? Et les Anglais ? Merci M. l’ambassadeur, j’attendrai près du téléphone… » Il raccroche, et en s’énervant appelle sa femme : « Suzanne, Suzanne, une révolution a eu lieu en Égypte… Une révolution contre le roi. »

Mohamed El Dessouki, le secrétaire privé de Taha Hussein, révèle dans son livre « Taha Hussein parle des figures de son époque » que, dès que la nouvelle de la révolution est parvenue à Taha Hussein, il écrivit à son ami Tawfik El-Hakim : « Combien j’aurais aimé être avec toi en Égypte ou que tu sois avec moi en Europe durant ces jours où l’Égypte écrit un nouveau chapitre de son histoire et en ferme un autre. Il me semble que la littérature a un rôle à jouer dans cette merveilleuse révolution, elle a été préparée avant qu’elle n’ait lieu et elle sera capturée après. »

Début août 1952, Taha Hussein a écrit le premier article sur cet événement historique dans le journal « Al Ahram », où il a qualifié le « mouvement béni » des officiers de révolution. Il était ainsi le premier à utiliser cette description. El-Zayyat rappelle : « Taha Hussein écrit dans son article que ce qui s’est passé en juillet 1952 était une révolution et non un coup d’État, ni un mouvement béni, ni autre chose. L’armée a répondu aux véritables demandes du peuple visant à se libérer d’un régime autocratique et à mettre fin à l’occupation. » Il ajoute : « Ce qui distingue une véritable révolution fertile, c’est qu’elle réfléchit au passé pour corriger ses défauts, au présent pour résoudre ses affaires et au futur pour construire un avenir solide et durable pour le peuple. Je n’ai aucun doute que notre révolution est authentique, elle ne se contente pas de renverser un gouvernement et d’exiler un roi, mais ce renversement et cet exil sont des moyens de réforme plus profonds, plus complets et plus globaux. »

Ainsi était la position de Taha Hussein envers la révolution dès son déclenchement en juillet, et c’est ainsi que s’est déroulée sa première rencontre avec son dirigeant Gamal Abdel Nasser. Le Dr. Mohamed El-Dessouki ajoute une autre anecdote rapportée par Taha Hussein.

Le doyen de la littérature a dit : « Gamal Abdel Nasser connaissait le poète et écrivain Kamel Al-Shinnawi et lui a dit : “J’aimerais voir le Dr. Taha Hussein”, et Kamel Al-Shinnawi m’a appelé après mon retour d’Europe. Je suis alors allé rencontrer Abdel Nasser au Conseil de commandement révolutionnaire. Ce qui m’a surpris lors de cette rencontre était qu’il lisait mes articles ayant pour titre un seul mot, et qu’il gardait les piastres qu’il recevait de son père pour acheter le journal où il publiait ses articles. » El Dessouki ajoute, citant le doyen : « Nos entretiens ont été nombreux, certains ayant eu lieu dans la maison privée de Gamal Abdel Nasser, et parfois un entretien pouvait durer plus d’une heure. Lors de notre première rencontre chez lui, il m’a décrit les sièges de la salle de réception et m’a dit : “Pour que tu ne croies pas ce que disent les gens, je n’ai pas déplacé le salon du palais d’Abedin chez moi.” Lors d’une autre rencontre au Conseil de commandement révolutionnaire, nous avons discuté de la question des armes défectueuses et du jugement de la cour qui a acquitté les accusés. Abdel Nasser m’a dit : “Nous devons donc être exécutés sur la place d’Abedin”, alors j’ai répondu au président : “Ce jugement montre que vous avez laissé la justice libre et sans influence, ce qui est à votre honneur.” Il a répondu : “Dis cela à Mohamed Naguib, pas à moi"